Les guerres civiles péruviennes (3): le soulèvement pizarriste, première partie

Le billet précédent s’était conclu par l’écrasement des troupes almagristes par le gouverneur du roi, Vaca de Castro, et par l’exécution de leur chef, Diego Almagro el Mozo. J’avais souligné que ce conflit marquait le moment où la couronne espagnole commençait à intervenir directement dans les affaires du Pérou. La nouvelle conquête n’était pas achevée, et n’avait pas encore montré tout son potentiel pour l’Espagne (les mines d’argent du Potosí ne seraient découvertes que quelques années plus tard), mais le butin des Pizarros, la densité de la population et le précédent du Mexique montraient déjà que la prise en main des territoires américains devenait un enjeu stratégique essentiel pour accroître la puissance de l’Espagne en Europe. Le soulèvement pizarriste fut une réaction à cette reprise en main. En terminant le billet que j’avais prévu consacrer à ces événements, j’ai constaté que j’avais nettement passé la limite de mots que je me fixe pour un billet, j’ai donc scindé le récit en deux. Cette première partie se termine essentiellement sur le point de non-retour du soulèvement.

Les ambitions de la monarchie

Pour consolider sa position après être arrivé au Pérou, Vaca de Castro commença par s’y comporter comme un chef conquistador parmi d’autres : il organisa de nouvelles expéditions pour occuper les combattants du jour d’avant et donner un nouvel élan à la conquête et il redistribua les encomiendas pour récompenser ceux qui l’avaient soutenu lors du second conflit almagriste et confisquer leurs biens à ceux qui n’avaient pas choisi le bon camp. Restait le problème de Gonzalo Pizarro. Francisco Pizarro, qui avait eu le titre de gouverneur au moment de la conquête, avait indiqué par acte notarié que si quelque chose devait lui arriver (être assassiné entre dans cette catégorie), son frère devait lui succéder comme gouverneur[1]. Pour Vaca de Castro, nommé gouverneur par la Couronne, Gonzalo pouvait donc représenter un rival dangereux, reposant sur une légitimité différente de la sienne. Aussi s’efforça-t-il de le tenir à distance en douceur. Il organisa une cérémonie au cours de laquelle il lui rendit hommage, le récompensa et l’envoya se reposer dans ses propriétés, une manière comme une autre de le tenir à l’écart des décisions[2].

Or, l’arrivée de Vaca de Castro pour mettre fin aux conflits opposant pizarristes et almagristes n’était que le commencement de l’intervention de la Couronne dans la conquête. Bien que la colonie péruvienne n’ait pas encore révélé tout son potentiel pour la politique impériale espagnole (les mines d’argent du Potosí étaient sur le point d’être découvertes, mais on n’y était pas encore), la richesse du butin récolté et la densité de population concernée, tant au Mexique qu’au Pérou était alléchante. En conflit avec les Valois de France, les luthériens d’Allemagne et l’Empire ottoman, Charles Quint avait des besoins financiers criants. Il lui fallait organiser les nouvelles colonies pour en retirer les impôts dont il avait besoin.

Le choc des « Nouvelles lois »

C’est dans ces conditions qu’il faut comprendre l’intérêt marqué par l’Empereur pour les idées défendues par Bartolomé de Las Casas. J’ai déjà dit un mot de ce religieux dominicain, choqué du traitement réservé aux « Indiens ». Bartolomé de Las Casas était convaincu que l’institution responsable de la « destruction des Indes » était l’encomienda, par laquelle on assignait le travail d’un certain nombre d’« Indiens » à un conquistador en récompense des services rendus, et en échange de la protection et l’évangélisation qu’il apporterait aux « Indiens ». C’était l’institution par laquelle les conquistadors épuisaient les autochtones qui leur étaient affectés, déstructuraient leur économie et favorisaient ainsi (involontairement, mais fatalement) la famine et la maladie qui l’accompagnait. Les multiples démarches de Bartolomé de Las Casas et de ses coreligionnaires de l’ordre dominicain ont porté fruit. En 1542, Charles Quint signait à Barcelone un ensemble de lois pour organiser les nouvelles conquêtes d’Amérique. Ces « Nouvelles Lois des Indes » (« nouvelles », parce qu’il y avait eu, en 1512, les « Lois de Burgos » mises à jour et remplacées par les lois émises depuis Barcelone) comprenaient notamment des dispositions pour limiter la portée des encomiendas. La plus importante d’entre elles était qu’on indiquait que celles-ci ne seraient pas héréditaires. Pour les encomenderos, le coup était rude. Il faut dire que Charles Quint n’était pas guidé que par bonté d’âme. Une trop grande puissance et une trop grande richesse des conquistadors risquaient de faire obstacle au renforcement de son autorité en Amérique, donc d’obtenir les richesses qu’il en espérait pour soutenir sa politique européenne. En faisant appel à lui pour prendre la défense des « Indiens », Bartolomé de Las Casas et les dominicains lui fournissaient un moyen et une légitimité pour attaquer la puissance de ses rivaux potentiels. C’est ainsi que peut s’expliquer que Charles Quint ait été favorable aux thèses lascasiennes alors même que, poussée à son aboutissement logique, la doctrine de Las Casas pouvait conduire à remettre en cause l’ensemble de la domination espagnole sur l’Amérique. Dans le cas du Pérou, une autre mesure rendit les Lois Nouvelles encore plus insupportables : tous ceux qui avaient pris part aux vendettas opposant les clans des Pizarros et des Almagros devaient être privés des encomiendas qui leur avaient été attribuées. Autant dire tout le monde[3].  Même Paullu Inca, le frère de Manco et « l’Inca fantoche » des conquistadors, s’était fait attribuer une encomienda, s’insérant ainsi dans le nouvel ordre du pouvoir mis en place par les Espagnols.

Gonzalo Pizarro contre le vice-roi

Pour appliquer les Lois Nouvelles, Charles Quint nomma un vice-roi du Pérou, ainsi que cinq auditeurs formant une chancellerie qui devait agir comme tribunal, organe de législation et d’administration. À l’arrivée du vice-roi Blasco Nuñez de Vela à Lima, les conquistadores les plus influents, de Cuzco, résolurent d’envoyer quelqu’un pour lui faire part de leurs plaintes et revendications contre les Lois Nouvelles. À leurs dires, Bartolomé de Las Casas avait falsifié les faits et avait été un encomendero particulièrement corrompu qui cherchait à se débarrasser de ceux qui avaient été témoins de ses forfaits, témoins qui se trouvaient désormais parmi les conquistadors du Pérou. Pour aller à la rencontre du vice-roi, les encomenderos firent appel au plus prestigieux d’entre eux : Gonzalo Pizarro. Celui-ci commença par mandater un émissaire en Espagne afin de plaider sa cause contre les émissaires du vice-roi. Puis, préférant à la voie de la conciliation celle de l’affrontement, il rassembla une armée de quatre cents Espagnols bien équipés, quelques pièces d’artillerie et quelques milliers d’auxiliaires « indiens » pour se porter à la rencontre du vice-roi, qu’il espérait bien intimider.

Dès lors, chacun comptait ses partisans ; la perspective de devoir entrer en conflit ouvert avec leur roi ne réjouissait guère bien des conquistadores qui firent défection du clan de Pizarro. Depuis son refuge de la forêt, Manco Inca pensa qu’il pourrait jouer le vice-roi contre Pizarro : il envoya en émissaire auprès du premier l’un des almagristes qui s’étaient réfugiés près de lui après la dernière guerre civile. Quel que soit l’accord auquel il parvint, toutefois, un malencontreux incident y mit fin : au retour de l’émissaire, l’Inca et lui jouèrent à une partie de boules et ce dernier, irrité pour une obscure raison, en frappa l’Inca et lui brisa le crâne. Manco désigna son successeur sur son lit de mort, qui exécuta l’Espagnol et ne poursuivit pas les démarches entreprises par son prédécesseur [4]. Entre-temps, les défections qui avaient frappé le camp pizarriste étaient telles que Gonzalo envisageait de prendre la fuite face au vice-roi : cependant, quelques importants partisans de celui-ci changèrent de camp à la dernière minute. Gonzalo Pizarro se retrouva en position de force.

La démarche d’intimidation porta quelque peu : à son approche, le vice-roi annonça qu’il suspendait pour deux ans l’application des Lois nouvelles. Comme Pizarro n’arrêta pas sa marche pour autant, le vice-roi envisagea de brûler la ville et de se retirer dans un site plus facile à défendre. Les auditeurs s’opposèrent à ce projet et firent mettre Nuñez de Vela aux arrêts par un capitaine qui leur était acquis ; le vice-roi parvint cependant à s’enfuir à l’occasion d’une émeute. Les auditeurs s’entendirent ensuite pour rendre à Pizarro le titre de gouverneur que ce dernier estimait lui revenir de droit. Le 28 octobre 1544, Pizarro et son armée, qui comptait désormais environ 1200 Espagnols, entrèrent à Lima [5]. L’ancien gouverneur Vaca de Castro s’enfuit à Panama ; l’expédition  envoyée à sa poursuite saccagea la ville [6] et Vaca de Castro se réfugia aux Açores où il attendit sans bouger la suite des événements. Le vice-roi, pour sa part, parvint à gagner Quito où, menant une campagne de propagande où il faisait passer Gonzalo Pizarro pour un tyran, il rassembla une armée considérable. Cependant, Gonzalo Pizarro, plus rusé, parvint à faire sortir le vice-roi de la cité et l’affronta sur un terrain favorable. Le vice-roi fut battu et tué à Añaquito, le 18 janvier 1546. Mais Pizarro triomphait, mais au prix d’une rébellion ouverte contre le roi.

Notes

[1] Bernard LAVALLÉ, Francisco Pizarro: conquistador de l’extrême, Paris, Payot, coll. « Biographie Payot », 2004, p. 303.

[2] Ibid., p. 296.

[3] Carmen BERNAND et Serge GRUZINSKI, Histoire du Nouveau Monde. 1, 1, Paris, Fayard, 1991, p. 519.

[4] Ibid., p. 521.

[5] Bernard LAVALLÉ, Francisco Pizarro, op. cit., p. 303‑305.

[6] Carmen BERNAND et Serge GRUZINSKI, Histoire du Nouveau Monde. 1, 1, op. cit., p. 523.

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Guerres civiles du Pérou colonial (2): Pizarristes contre almagristes

Mon précédent billet racontait comment les Espanols se sont insérés au sein des guerres civiles incaïques et en ont tiré profit pour faire la conquête de l’Empire inca. J’espère que le récit a laissé assez de place aux factions en présence pour montrer que les Incas n’ont pas été de simples dupes de l’histoire, que chacune des factions a manœuvré pour utiliser les Espagnols de Pizarro à leur avantage, alternativement. Pizarro et les siens se sont même plusieurs fois trouvés en difficultés face à ces manœuvres. J’avais terminé mon billet au moment où, Cuzco prise, ils commençaient à se trouver en position de force. J’avais par ailleurs évoqué à quelques reprises les conflits entre Francisco Pizarro et son partenaire Diego de Almagro. Enfin, j’avais mentionné le retrait de Manco Inca en périphérie de l’empire. Quelques précisions sur ce dernier sont nécessaires, car en relisant le dernier billet j’ai constaté que je suis passé un peu vite sur son cas et qu’on risquait de se tromper dans la chronologie.

La contre-attaque de Manco Inca

D’où venait Manco Inca ? Jeune homme doté de peu d’expérience politique, issu de l’establishment de Cuzco, la capitale inca, il était aussi le frère de Tupac Huallpa. Lorsque, après la mort des rivaux à la succession de l’empire, Pizarro avait eu besoin d’un nouvel Inca pour mener sa politique, il avait choisi Tupac Huallpa. Mais, comme on l’a vu dans le précédent billet, ce dernier mourut alors que les conquistadors étaient sur le chemin de la capitale. Manco fut le prétendant proposé par l’aristocratie de Cuzco pour lui succéder. Comme on l’a vu, Pizarro a joué double jeu au moment de la succession, en donnant le sentiment à la fois aux représentants de Cuzco et à ceux de Quito qu’il appuierait leur candidat. À l’approche de Cuzco, Manco Inca se porta au-devant des Espagnols. Jugeant l’alliance de Cuzco plus utile que celle de Quito à ce stade, Pizarro et ses lieutenants supprimèrent son rival et luttèrent contre les partisans de Quito avant d’arriver à Cuzco. Lorsqu’ils occupèrent la place, ils y trouvèrent une ville largement désertée par les forces susceptibles de la défendre. Sûrs de leur position de force, ils en profitèrent pour « couronner » Manco en ayant recours à tout le cérémonial et les lieux sacrés disponibles à Cuzco. Pendant un temps, Manco eut le comportement de pantin attendu des Espagnols, accompagnant ceux-ci à l’occasion de certaines expéditions, procurant des auxiliaires à leurs soldats, en échange de quoi il était traité par les Espagnols avec les égards dus à son rang. Pourtant, alors qu’Almagro venait de partir avec ses hommes pour le Chili et que Pizarro était occupé à distance de Cuzco, Manco Inca tenta de fuir la ville et fut capturé à quelques lieux de là. Dès lors, la troupe traita l’Inca en prisonnier, le chargeant de chaînes et l’humiliant[1]. Ce traitement dura un temps, jusqu’à ce que, en avril 1537, Hernando Pizarro rentre à Cuzco. Le frère de Francisco Pizarro prit immédiatement des mesures pour réserver à l’Inca un traitement plus digne, craignant que les humiliations ne mènent au soulèvement de la population de Cuzco. Dès lors, Hernando Pizarro et Manco Inca eurent de nombreux conciliabules. Pour montrer son amitié, Manco Inca révéla la cachette d’une statue d’or et s’en fut la chercher pour le conquérant. Il proposa ensuite un second cadeau, similaire, et alla le chercher dans une ville à une distance de quelque 40 kilomètres de Cuzco. Il n’en revint pas. L’expédition envoyée le chercher fut accueillie à coup de pierre et de flèches, et aussitôt un vaste soulèvement se fit et les Espagnols se retrouvèrent assiégés à Cuzco. Depuis sa captivité, Manco Inca était parvenu à orchestrer non seulement sa fuite, mais un soulèvement général dans toute la part du pays soumis à l’influence des Incas de Cuzco.

Pourtant le soulèvement était miné. Les Espagnols disposaient encore d’alliés, principalement chez des groupes indigènes qui profitaient de l’affaiblissement du pouvoir central inca et, aux marges de l’empire, de groupes opposés à ceux-ci. De plus, parmi, même, l’establishment de Cuzco, plusieurs firent défection de l’armée de l’Inca pour rejoindre le camp espagnol, cherchant chez ces derniers des alliés contre les lignages rivaux[2]. Ainsi, au moment même où les Incas retrouvaient leurs capacités de résistance face à l’envahisseur espagnol, les mécanismes de la guerre civile qui avaient permis au loup d’entrer dans la bergerie jouaient encore. Malgré ces faiblesses, le soulèvement de l’Inca Manco dura longtemps et plusieurs contingents espagnols furent massacrés, les cols de montagne leur furent interdits, les Incas ont développé de nouvelles tactiques pour faire face à la cavalerie et démontré qu’ils ne craignaient plus les armements et chevaux des Espagnols. Demeuraient cependant encore quelques méconnaissances des techniques de guerres européennes qui, en plus des divisions internes, jouèrent contre eux. Francisco Pizarro, à Lima, parvint à briser le siège mené contre lui ; son frère Hernando, qui tenait Cuzco, ne parvenait pas à en faire autant et attendait l’arrivée des secours lorsque Diego de Almagro revint du Chili[3].

Pizarristes contre almagristes

J’ai déjà évoqué les échecs successifs des Espagnols au Chili, notamment dans le billet sur les limites de l’expansion coloniale espagnole. Si le nord du Chili avait brièvement été conquis par les Incas, la domination de ces derniers y avait toujours été fragile et le pays n’avait ni les richesses ni la densité de population nécessaire pour intéresser réellement les Espagnols. En effet, les conquistadors comptaient sur deux facteurs pour s’enrichir : soit le butin amassé au cours de la conquête — qui fut considérable dans les grands centres des empires aztèques et incas — soit les encomiendas, le travail forcé d’un certain nombre d’autochtones accordés à un conquistador en échange de ses services lors de la conquête. En l’absence de richesse, le butin ne pouvait être pauvre et, en l’absence de densité de population, les possibilités de s’enrichir d’une encomienda étaient faibles. Déçus, Almagro et ses hommes voulurent rentrer au Pérou, revenir sur l’accord auparavant passé avec les Pizarros et revendiquer Cuzco pour leur[4].

Arrivé devant Cuzco assiégée, le plan conçu par Almagro fut de chercher l’alliance de Manco contre Hernando Pizarro. Pendant un temps, Manco se retrouva donc dans la position où il pouvait arbitrer de la victoire entre les deux clans, traitant avec Diego de Almagro, d’une part, et Hernando Pizarro, d’autre part. Il semble que Manco Inca ait eu à cette époque l’espoir qu’il pourrait utiliser Almagro contre Pizarro tout en convainquant Almagro de quitter le pays en échange de grandes quantités d’or [5]. À la fin, cependant, ce fut une occasion ratée. Convaincu par Pizarro qu’il ne pouvait à Almagro, Manco mit fin à la rencontre avec ce dernier. Almagro avait en outre à ses côtés, depuis son expédition du Chili, un dénommé Paullu qui avait également des prétentions au statut d’Inca. Manco se retira, laissant la voie libre à Almagro. Refusant toute conciliation avec Hernando Pizarro, celui-ci investit Cuzco et captura son adversaire. La troupe envoyée, depuis Lima, par Francisco Pizarro fut mise en déroute par les almagristes. Ainsi libéré de toute menace immédiate de la part du clan adverse, Almagro fit consacrer Paullu Inca et se retourna contre Manco Inca, qu’il contraignit à battre en retraite[6]. Il échoua cependant à le capturer et Manco trouva refuge de l’autre côté des Andes, à l’orée de la forêt amazonienne, en un lieu très difficile d’accès pour les Espagnols. Ce petit royaume, dernier résidu de l’Empire inca, demeurera en place, menaçant les Espagnols par des raids, jusqu’en 1570.

Désormais fermement établi à Cuzco, disposant d’un otage de choix en la personne d’Hernando Pizarro, Almagro neutralisa les partisans pizarristes et redistribua les encomiendas de la région à ses partisans. Il poursuivit ensuite dans la voie des provocations en fondant une petite cité près de Lima, cité fondée par Francisco Pizarro et occupée par ses partisans. En installant ses propres partisans dans la région, Almagro envoyait le signal qu’il comptait contester les encomiendas de la région de Lima également. Une ultime médiation fut tentée en novembre 1537, par un religieux, le père Francisco de Bobadilla, qui connaissait les deux adversaires. Lors de la rencontre, toutefois, Bobadilla se comporta davantage en juriste qu’en conciliateur : sur l’examen des documents connus, il donna raison à Pizarro, demanda à Alvaro de libérer ses otages et d’évacuer Cuzco sur la promesse que, si la Couronne confirmait ses prétentions, la ville serait restituée par Pizarro. Il n’en était pas question pour Almagro et la médiation échoua. De tractation en tractation, Almagro accepta cependant de libérer Hernando Pizarro. Mal lui en prit : aussitôt libéré, ce dernier devint partisan de la ligne dure contre les almagristes[7].

Les deux factions se rencontrèrent aux Salines, ainsi nommées pour les sources salées qui y coulaient. Plus nombreux et mieux équipés, les pizarristes l’emportèrent et un nombre important des partisans d’Almagro, incapables de fuir, furent massacrés sur place. Les autochtones ne semblent pas avoir pris à la bataille entre les factions espagnoles, mais regardèrent de loin, apparemment fort surpris, celles-ci s’égorger mutuellement. Il semble que l’idée courut parmi les spectateurs de profiter de l’occasion pour en finir avec les envahisseurs. Cependant, faute d’un commandement unifié capable d’en prendre l’initiative[8]. Il faut dire que les hiérarchies traditionnelles avaient été considérablement bouleversées par les multiples successions d’Inca, les guerres menées par les Espagnols avec des alliés indigènes et la promotion qu’il en résultait parfois[9]. Dans ces conditions les spectateurs se contentèrent de dépouiller les cadavres laissés sur place.  Almagro fut capturé par les pizarristes et exécuté à Cuzco plusieurs mois plus tard[10].

L’affrontement entre pizarriste et almagristes est généralement décrit comme une guerre civile entre Espagnols. Sachant le faible nombre des participants, le terme de guerre civile est peut-être un peu fort. En effet, bien que l’arrivée d’expéditions successives après celle initialement conduite par Francisco Pizarro ait gonflé les effectifs, les multipliant peut-être par dix, il y eut sans doute moins de deux mille Espagnols impliqués. Les enjeux étaient immenses, mais du point de vue des effectifs, c’était une querelle de bandes.

Le second conflit almagriste

La victoire des Pizarros suscita une nouvelle redistribution des encomiendas à ceux de leur faction. Les almagristes survivants furent réduits à la misère. Pour éviter une nouvelle révolte, Francisco Pizarro, le plus conciliant des frères, organisa plusieurs expéditions, notamment vers la Bolivie et le Chili, ou d’autres parties de l’ancien Empire inca, pour assujettir ces régions. Ces expéditions étaient largement composées d’anciens partisans d’Almagro. Ce faisant, Pizarro faisait d’une pierre deux coups : il éloignait les almagristes des centres vitaux de son empire en formation et leur donnait l’occasion de se tailler une nouvelle fortune, espérant que cela mettrait fin aux rancœurs entre les deux factions[11]. De plus, Hernando Pizarro fut envoyé en Espagne pour rapporter le récit des événements et plaider la cause des Pizarros. Ayant lui-même été partisan de la ligne dure envers les almagristes et un artisan de l’exécution de leur chef, cette mission était également un moyen de le mettre à l’abri d’une tentative d’assassinat[12].

Car les expéditions ne calmèrent pas réellement les tensions entre les adversaires. Tous les almagristes ne prirent pas part à celles-ci et elles ne furent pas toutes des succès. Un certain nombre des anciens partisans d’Almagro se regroupèrent à Lima. Là se trouvait le fils métis et l’héritier d’Almagro, Diego Almagro el Mozo. À l’occasion de la première guerre, Francisco Pizarro l’avait pris sous sa protection, eu égard à la longue amitié qui l’avait autrefois lié à son rival. Almagro père avait après tout été le plus ancien collaborateur de Francisco Pizarro. Mais c’est autour de lui que les almagristes déçus se regroupèrent. De plus, à Lima, de nouveaux Espagnols arrivaient, mais trop tard pour profiter des fruits de la conquête. Ils firent cause commune avec les almagristes. Francisco Pizarro fut attiré dans un piège et tué le 26 juin 1541[13].

Dès lors, les partisans d’Almagro el Mozo commencèrent à prendre progressivement les différentes cités du pays. Gonzalo Pizarro, qui était à ce moment le plus influant de sa fratrie, était éloigné dans une expédition qui ne porta pas fruit et la réaction de son clan fut lente à venir. Profitant de l’effet de surprise, les almagristes parcouraient le pays en arrêtant les plus riches des conquistadors, généralement pizarristes, pour leur soutirer leurs richesses. Des lieutenants pizarristes se soumirent, d’autres résistèrent. Sans doute soucieux d’alimenter la discorde, Manco Inca appuya Almagro en lui envoyant tous les équipements que ses raids avaient pu piller aux Espagnols[14].

Tandis que les combats faisaient rage, un nouveau gouverneur nommé par le roi arrivait, un dénommé Vaca de Castro. Il devint une figure de ralliement pour tous ceux qui cherchaient à échapper aux troupes d’Almagro. Quand Gonzalo Pizarro revint de son expédition, cependant, Vaca de Castro refusa son alliance afin de ne pas sembler prendre parti entre les deux factions. C’est donc comme représentant du roi, non comme pizarriste, qu’il affronta Almagro[15]. Contre les Pizarros ou contre le représentant de la couronne, Almagro el Mozo jouait sur la corde sensible des dépossédés. D’après Gruzinski et Bernand, « Il avait promis à tout homme qui tuerait un membre de la faction adverse de lui donner en récompense ses Indiens, ses biens et sa femme. »[16]. Les adversaires s’affrontèrent à la bataille de Chupas, en 1542. Mieux équipées et comptant dans leurs rangs des vétérans des guerres d’Italie, les troupes royalistes l’emportèrent contre les almagristes. Des autochtones, tels que Paullu Inca et quelques-uns des siens, se battaient aux côtés des almagristes [17]; d’autres, comme aux Salines, assistèrent sans intervenir au combat, puis pillèrent les dépouillent et égorgèrent les blessés des deux camps qu’ils purent trouver. Considéré comme un traître à la Couronne, Diego Almagro el Mozo fut exécuté peu après la bataille. Un certain nombre de ses partisans s’enfuirent dans les communautés autochtones qui jouissaient encore d’une certaine autonomie vis-à-vis des Espagnols. Cinq d’entre eux furent accueillis par Manco Inca[18].

Ce second conflit des « guerres civiles » (si on ne compte pas les guerres civiles entre Incas, dont j’ai parlé au premier billet), bien que ne mettant pas aux prises beaucoup plus de combattants que le premier, signale pour la première fois l’intervention directe de la Couronne au Pérou. Il faisait entrer l’évolution des événements dans une nouvelle phase, où les initiatives individuelles des conquistadores devaient être marginalisées et le pouvoir central renforcé. Cela ne se ferait pas sans de nouveaux conflits et de nouvelles guerres civiles. Je reviendrai sur celles-ci dans un prochain billet.

N.B. : Étant donné que je suis en période de déménagement, ce qui peut avoir des impacts sur ma disponibilité et sur mon accès internet, il n’est pas impossible que les prochains billets ne viennent pas avec la régularité habituelle. Nous verrons comment cela se présente.

Notes

[1] Bernard LAVALLÉ, Francisco Pizarro: conquistador de l’extrême, Paris, Payot, coll. « Biographie Payot », 2004, p. 221‑222.

[2] Ibid., p. 227‑228.

[3] Ibid., p. 225‑232.

[4] Ibid., p. 232‑233.

[5] Carmen BERNAND et Serge GRUZINSKI, Histoire du Nouveau Monde. 1, 1, Paris, Fayard, 1991, p. 491.

[6] Ibid., p. 491‑492.

[7] Bernard LAVALLÉ, Francisco Pizarro, op. cit., p. 236‑250.

[8] Ibid., p. 251‑255.

[9] Carmen BERNAND et Serge GRUZINSKI, Histoire du Nouveau Monde. 1, 1, op. cit., p. 489.

[10] Bernard LAVALLÉ, Francisco Pizarro, op. cit., p. 256‑261.

[11] Ibid., p. 266‑270.

[12] Ibid., p. 309‑313.

[13] Ibid., p. 279‑286.

[14] Ibid., p. 289‑293.

[15] Ibid., p. 292‑294.

[16] Citant le chroniqueur Zárate, Carmen BERNAND et Serge GRUZINSKI, Histoire du Nouveau Monde. 1, 1, op. cit., p. 510.

[17] Ibid., p. 510‑511.

[18] Bernard LAVALLÉ, Francisco Pizarro, op. cit., p. 294‑296.

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Guerres civiles du Pérou colonial (1): les guerres civiles incas

On dit souvent que les conquistadores espagnols en Amérique profitèrent des divisions des empires qu’ils rencontraient. C’est absolument vrai, mais on évoque moins d’autres aspects de la question. D’une part, si les Espagnols instrumentalisèrent les divisions, il n’est pas moins vrai que les factions en présence parvinrent plus d’une fois à instrumentaliser les Espagnols à leur fin. D’autre part, on oublie souvent les divisions qu’il y eut entre les conquérants. Mon objectif, dans cette série de deux billets, est de donner un aperçu — modestement, car je dois faire court — de la complexité de la situation. Au Pérou, la guerre civile rencontrée par les Espagnols chez les Incas se prolongea d’une, voire de deux guerres civiles entre Espagnols. Ces dernières, ainsi qu’une ébauche de conclusion, seront l’objet d’un prochain billet.

Le Pérou colonial fut la proie des guerres civiles dès avant la conquête des frères Pizarro, jusqu’à l’établissement d’une vice-royauté capable d’imposer son hégémonie, vers le milieu du XVIe siècle, disons de 1528 à 1548. L’Empire inca était un ensemble politique relativement centralisé, du moins davantage que l’empire aztèque. Divisé en quatre grandes régions administratives, il était connu de ses habitants comme le Tawantinsuyu. La machine administrative inca centralisait les revenus fiscaux à Cuzco ce qui, malgré l’existence d’un système redistribuant une partie des richesses, n’était pas sans engendrer quelques rancœurs chez les peuples les plus récemment conquis, d’autant que ces conquêtes ont pu être particulièrement violentes. Dans l’un de ses premiers contacts avec l’Empire inca, Francisco Pizarro s’est fait raconter que l’Inca Huayna Capac avait détruit une vingtaine de villages et massacré leurs habitants[1]. Les deux premières expéditions de Francisco Pizarro avaient été des explorations, voire des errances sans objectifs précis. Il n’avait pas conquis de territoires, mais ces voyages l’avaient amené avec quelques hommes près de la frontière de l’Empire inca. C’est sans doute de l’un de ces hommes que parti l’épidémie de variole qui frappa les Incas en 1528. L’Inca Huayna Capac et son héritier Ninan Cuichi n’en réchappèrent pas. L’Inca mourrait donc sans succession claire. L’un de ses fils, Huáscar, prit la succession avec l’appui de la plus grande partie de l’aristocratie de la capitale, Cuzco. Mais un frère rival, Atahualpa, contesta ses prétentions. Ayant mené des campagnes militaires dans le nord de l’empire, il jouissait de nombreux appuis dans la région de Quito (actuelle capitale de l’Équateur), où se trouvait une aristocratie régionale qui ambitionnait de gagner en importance dans l’empire, contre les élites de Cuzco. Quand Francisco Pizarro arrive à la tête de sa troisième expédition, avec une idée un peu plus précise de ce qu’il cherche cette fois, il arrive donc en pleine guerre civile, dont il peut observer les traces ou entendre les rumeurs au cours de sa progression. Huáscar disposait de forces supérieures et avait remporté aisément les premières batailles de la guerre, mais, imprudent, il s’était laissé surprendre et capturé par la suite. Atahualpa triomphait contre toute attente[2].

Pizarro utilisa les dissensions de l’Empire inca pour jouer un groupe contre l’autre au cours de sa progression, il les utilisa également pour se donner l’occasion de rencontrer Atahualpa, mais aussi pour justifier sa conquête en présentant ce dernier comme un usurpateur et un tyran. Pizarro avait pris appui sur des inimitiés locales dans la région de Tumbles, qui avaient sans doute été avivées par la guerre civile[3]. Puis il avait profité du fait qu’Atahualpa jouait avec l’idée de se servir de lui pour soumettre quelques partisans de Huáscar qui n’avaient pas encore été assujettis. Lors de la rencontre, Pizarro était pourtant accompagné de guerriers Cañaris, partisans de Huáscar[4]. Suite à la rencontre avec les officiers de Pizarro, Atahualpa renonça à l’alliance et décida plutôt d’attaquer celui-ci par surprise. La tactique échoua, car les Espagnols, méfiants, lui avaient tendu embuscade. C’est à l’occasion de cette rencontre que Pizarro captura Atahualpa. Peu après, il se rendit maître de Huáscar… qui fut assassiné sur ordre d’Atahualpa, pour éviter que les Espagnols ne se servent de son rival contre lui. Atahualpa, toujours prisonnier des Espagnols, avait cependant de nombreuses cartes en main. La sécurité et la capacité d’agir des Espagnols dépendaient de lui et des ordres qu’il transmettait. Ils avaient besoin de lui pour disposer de quelque marge de manœuvre et rassembler les métaux précieux de sa rançon. Toutefois, ces avantages étaient contrebalancés par un inconvénient important : la capitale avait soutenu son rival pendant la guerre civile et la loyauté de Cuzco ne lui était donc pas acquise. Un délégué de Cuzco, nommé Túpac Huallpa, se présenta en effet auprès de Pizarro pour lui expliquer qu’Atahualpa ne jouissait d’appuis que dans quelques régions du nord et accuser l’Inca de tous les crimes. La pression exercée par les partisans de Huáscar fut bientôt relayée par les hommes de la troupe espagnole : Atahualpa n’était pas le prisonnier qui pourrait leur permettre de progresser vers le sud. De leur côté, les représentants de la capitale cherchaient à se servir des Espagnols pour éliminer leur ennemi, qui risquait de saper leur influence au profit de l’aristocratie du nord. Cette convergence des intérêts mena à l’exécution de l’Inca[5]. Puisqu’ils avaient l’émissaire de Cuzco, Túpac Huallpa, sous la main, les Espagnols organisèrent une cérémonie pour en faire le nouvel Inca, car ils avaient besoin d’une figure régnante pour mener leurs politiques à travers celle-ci.

Entre-temps, un autre événement introduisait le germe des futures guerres civiles. Diego de Almagro, associé de Francisco Pizarro, arrivait au Pérou. Almagro avait pris une part capitale dans l’organisation et le financement de l’expédition de Pizarro, mais leur collaboration avait toujours été difficile. Lorsqu’ils rejoignirent la troupe de Pizarro, Almagro et ses hommes étaient bien décidés à toucher leur part du butin rassemblé lors de la capture d’Atahualpa et ils s’estimèrent finalement floués par le partage qui fut décidé. L’amertume devait par la suite couver entre les deux troupes jusqu’à éclater ouvertement quelques années plus tard[6]. Mais pour qu’elle éclate au grand jour, il manquait une étincelle qui arriverait quelque peu après la prise de Cuzco.

Pour parvenir à la capitale, les Espagnols jouèrent encore les rivalités des deux factions. L’Inca Túpac Huallpa mourut (assassiné ?) sur la route de Cuzco. Pizarro se retrouva dans la position d’arbitrer son successeur, en feignant auprès de chacune des factions de préférer son candidat[7]. À l’approche de la capitale, il rallia de plus en plus les anciens partisans d’Atahualpa et la faction rivale déserta la ville, la livrant aux envahisseurs. Cette victoire décisive fut le pôle à partir duquel les Espagnols commencèrent à gagner plus sûrement différentes régions de l’empire, en s’appuyant sur leurs alliances et des expéditions ciblées. Entre-temps, un  Inca indépendant, Manco Inca, se retirait dans une région marginale pour tenter de refaire ses forces.

À cette étape également, la tendance commence à basculer et, de guerre civile inca, la dynamique commence à ressembler à une guerre civile entre conquistadors. Car dès qu’ils commencent à se sentir sûrs de leur position, les Espagnols commencent à se quereller pour le butin. En prenant connaissance des nouvelles du Pérou, un ancien lieutenant de Cortés, nommé Pedro de Alvarado, qui venait de monter une expédition vers des îles du Pacifique, la détourna vers Quito, que l’expédition de Pizarro avait contourné. Il espérait ainsi profiter de l’émiettement de l’empire. Almagro se porta à sa rencontre ; puisqu’Alvarado n’avait aucune autorisation officielle, une partie de ses hommes étaient mécontents et souhaitaient éviter tout affrontement. Almagro sut tourner cette situation à son avantage, il s’entendit avec Alvarado pour lui payer une somme coquette en échange de laquelle il reprenait le commandement de ses hommes et le matériel qu’il avait apporté. En ajoutant la troupe d’Alvarado à la sienne, Almagro se retrouvait ainsi en posture de rivaliser avec Franscisco Pizarro et ses frères.

L’acte suivant de l’affrontement se produisit en Espagne, alors que les représentants des deux clans, envoyés à la couronne, proposaient leur récit de la conquête, offraient au souverain espagnol la part du butin qui lui revenait (le cinquième) et cherchaient à faire préciser les récompenses de chacun. L’organisation initiale de l’expédition prévoyait que Pizarro serait le gouverneur des terres conquises, mais demeurait imprécise. Hernando Pizarro, frère de Francisco, plaida pour que la part dévolue à son frère se rende jusqu’à Cuzco. Almagro se faisait concéder un gouvernement au sud de la part dévolue à Pizarro. Or, au terme des manœuvres, un flou demeurait sur le gouvernement de Cuzco. Lorsque les nouvelles arrivèrent à la capitale inca, les deux camps passèrent près d’en venir aux mains. Mais des tractations de dernière minute entre Franscisco Pizarro et Almagro évitèrent, ou différèrent, l’affrontement : Cuzco resterait pizarriste. Almagro partirait à la conquête des terres du sud, au Chili[8]. J’ai déjà évoqué rapidement ce qu’il advint de cette expédition : elle déboucha sur de nouvelles guerres civiles. J’y reviendrai dans un prochain billet qui viendra compléter celui-ci.

Notes

[1] Carmen BERNAND et Serge GRUZINSKI, Histoire du Nouveau Monde. 1, 1, Paris, Fayard, 1991, p. 458.

[2] Bernard LAVALLÉ, Francisco Pizarro: conquistador de l’extrême, Paris, Payot, coll. « Biographie Payot », 2004, p. 123‑128.

[3] Ibid., p. 123.

[4] Carmen BERNAND et Serge GRUZINSKI, Histoire du Nouveau Monde. 1, 1, op. cit., p. 465‑466.

[5] Bernard LAVALLÉ, Francisco Pizarro, op. cit., p. 165‑171.

[6] Ibid., p. 159‑165.

[7] Ibid., p. 184.

[8] Ibid., p. 202‑214.

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