« L’intellectuel médiéval »: une tension emic-etic

Depuis la parution d’un excellent petit livre de Jacques Le Goff intitulé « Les intellectuels au Moyen Âge », il existe nombre d’études d’histoire médiévale qui se centrent sur la dénomination « intellectuel ». Or, ce mot n’existait pas au Moyen Âge. Faut-il écarter pour autant cette historiographie du revers de la main ? Bien sûr que non, mais cela implique un certain nombre de prudences. Il faut commencer par cerner les enjeux suscités par ce choix de mot.

Jacques Le Goff avait lui-même assez bien saisi les enjeux. Le groupe social qu’il cherchait à étudier était composé de gens qu’on appelait des « philosophus ». Mais ce terme rappelle « philosophe », que nous utilisons aujourd’hui avec un bagage de connotations nettement différent de celles qui sont rendues au Moyen Âge par « philosophus ». Le philosophe, aujourd’hui, est associé à une discipline universitaire spécifique, ou renvoyé à une attitude de détachement par rapport à la vie (« il prit la nouvelle avec philosophie »). L’emploi du terme « philosophus » aurait donc orienté le lecteur contemporain vers une compréhension erronée de ce qu’était ce groupe social. Le Goff s’est donc mis à la recherche du terme contemporain le plus proche de ce qu’étaient les philosophus. En fait, il en en est un dont la définition lui semble décrire avec exactitude les philosophus : intellectuels. Ils seraient des intellectuels, ne leur manquant que le nom. Bien sûr, ce choix est discutable, puisqu’il existe de nombreuses définitions d’intellectuels. Comme je l’ai déjà indiqué, Christophe Charle pense que toute définition de ce qu’est un intellectuel est une manière pour celui qui la donne de se situer dans le champ, de se définir soi-même comme intellectuel et d’exclure d’autres personnes de ce groupe social[1]. Dans le cas de Jacques Le Goff, c’est moins de se situer lui-même qui a importé que de situer son objet, lointain dans le temps, par rapport à un terme qu’on utilise aujourd’hui[2]. C’est pourquoi il a sélectionné, de préférence, la définition la plus large et la plus souple parmi celles communément données à ce terme (un homme de culture intervenant politiquement et socialement), qui lui permette d’inclure les philosophus dans la continuité du grand phénomène des intellectuels. Cependant, dans la définition de Noiriel, dont j’ai parlé sur ce blogue à plusieurs reprises, cette démarche ne pourrait fonctionner[3]. Pour Noiriel en effet, la groupe social des intellectuels naît d’une certaine configuration de l’espace public, de la spécialisation des disciplines et de l’affinement de la division sociale du travail. C’est pourquoi, pour lui, ce groupe est propre à la modernité tardive, n’apparaissant qu’à la fin du XIXe siècle, avec l’apparition du mot « intellectuel », sous sa forme substantivée.

Ces différentes remarques permettent de situer l’enjeu de la relation entre l’emic et l’etic dans une perspective historique. Le langage utilisé par l’historien est trompeur, tant qu’il se cantonne à un seul de ces niveaux de langage : c’est en confrontant les enjeux intégrés aux deux niveaux de langage qu’on peut comprendre le passé. En effet, à défaut de confronter les deux langages, on risque deux pièges opposés dans leur structure, mais similaires quant à leur résultat :

  1. Dans le premier cas, on utilise le langage actuel, et les concepts qu’il véhicule, pour comprendre le passé, avec pour résultat d’en faire une lecture anachronique, projetant le concept actuel sur les réalités passées.
  2. Dans le second cas, on utilise un langage ancien, mais qui, faute d’être comparé au langage actuel, n’est pas compris selon ses propres normes. Il est donc compris comme son plus proche analogue actuel, ce qui a aussi pour résultat une lecture anachronique du passé, en lui appliquant un concept présent (quoique pas le même que dans le cas 1).

La solution adoptée par Le Goff fut, en quelque sorte, un exercice d’analyse de traduction : analyser le terme médiéval et choisir, par la suite, un mot moderne pour « dire presque la même chose » selon l’expression d’Umberto Eco. La solution est élégante, mais n’esquive pas entièrement le premier écueil. Tenu de garder toujours à l’esprit la relation emic-etic entre le « philosophus » et « l’intellectuel médiéval », le lecteur est doté d’outils pour éviter de projeter le sens actuel sur le sens médiéval, mais demeure soumis à cette tentation. La fortune du terme « intellectuel » dans une certaine historiographie médiéviste postérieure pourrait en témoigner. Cette historiographie sur les intellectuels médiévaux fut suffisamment prolifique pour que, abordant les origines des intellectuels à la fin du XIXe siècle, Yvan Lamonde ressente le besoin de se justifier de s’interroger sur un possible anachronisme qui consisterait à parler d’intellectuels avant la naissance du mot[4]. Les précautions initiales de Le Goff ne sont pas toujours répétées et les confusions peuvent aisément renaître.

Notes

[1] Christophe CHARLE, Les intellectuels en Europe au XIXe siècle: essai d’histoire comparée, 2. ed., Paris, Éd. du Seuil, coll. « Points Histoire », n˚ 291, 2001, 452 p.

[2] Jacques LE GOFF, Les intellectuels au Moyen Âge, Paris, Seuil, 2000, 188 p.

[3] Gérard NOIRIEL, Dire la vérité au pouvoir. Les intellectuels en question, Marseille, Agone, 2010, 310 p.

[4] Yvan LAMONDE, « Les « intellectuels » francophones au Québec au XIXe siècle: questions préalables » », Revue d’histoire de l’Amérique française, 1994, vol. 48, no 2, pp. 153‑185.

Notes sur la Querelle des rites

J’ai appris l’existence de la Querelle des rites au début de mon doctorat, en préparant la première liste de lecture de ma scolarité. Elle occupait quatre pages dans l’ouvrage classique de Jean Delumeau — que j’ai lu dans sa version révisée en collaboration avec Monique Cottret — Le catholicisme entre Luther et Voltaire. En relisant aujourd’hui le paragraphe que j’y ai consacré dans le travail remis à cette occasion, je me dis que j’ai nettement sous-estimé la portée de cette question, la réduisant à un débat opposant un modèle de « tolérance religieuse » porté par les Jésuites à un modèle de tabula rasa culturelle porté par les Franciscains et les augustiniens. Je crois me souvenir que c’est dans mes échanges avec Gabriel Monette, qui travaillait à cette époque sur un mémoire sur le baron d’Holbach, que j’ai pensé pour la première fois que l’enjeu crucial ne concernait pas la tolérance, mais ce que j’appelais à ce moment-là, d’une manière un peu impertinente, « le suicide de la chrétienté ». Aujourd’hui, je dirais plutôt qu’il concerne la question de la sécularisation du monde.

Si je rassemble ici les quelques notes que j’ai sur le thème, je pourrai préciser un peu cette intuition.

Fondamentalement, la querelle des rites oppose les partisans de deux méthodes d’évangélisation inconciliables. Les chrétiens européens, en portant la mission au sein de sociétés desquelles ils ignoraient la langue et la culture, se heurtèrent à des difficultés inattendues. Que devaient-ils enseigner comme étant le « christianisme »? Dans quel langage devaient-ils l’enseigner? Delumeau esquisse rapidement les deux camps :

La plupart des Jésuites voulaient désoccidentaliser le Christianisme et admettre des civilisations de l’Asie tout ce qui n’était pas incompatible avec l’Évangile. […] En face d’eux, dominicains, franciscains et Vicaires apostoliques issus des Missions étrangères exaltaient comme saint Augustin la puissance de la grâce, refusaient les accommodements, exigeaient des conversions totales, fussent-elles rares.[1]

C’est la venue en Chine d’un dominicain et d’un franciscain, qui avaient d’abord pratiqué la mission aux Philippines, qui marque, pour Delumeau, le début de la querelle. L’événement se situe en 1631 : ils y découvrirent que les missionnaires jésuites en Chine, notamment Mateo Ricci, avaient utilisé le vocabulaire religieux chinois pour traduire les termes de la religion catholique. Ainsi le terme désignant Dieu désignait-il aussi l’Empereur de Chine. Des pratiques rendant hommage à la mémoire des morts leur semblaient, par ailleurs, relever de la religion « païenne » des Chinois et n’étaient pourtant pas abandonnées par les convertis chinois. En 1645, à la demande du dominicain, le Pape condamna les pratiques des Jésuites. En 1654, il recevait le point de vue des Jésuites et réhabilitait leur pratique en 1656. À Canton, en 1668, une réunion de représentants de divers ordres, dont une nette majorité de jésuites, réaffirmait les pratiques des jésuites. Mais le dominicain participant publia en France une histoire de l’évangélisation en Chine qui était très hostile à ces dernières (2 volumes, 1676 et 1679). Ce récit porta la querelle des rites à la connaissance du public cultivé européen. En 1699, une commission cardinalice condamna le « laxisme » missionnaire des jésuites. La réplique des jésuites vint à travers l’Empereur de Chine lui-même, qui, à leur demande, déclara que les cérémonies du confucianisme n’étaient que civiques et familiales, non religieuses. Pourtant, en 1704, Rome trancha contre les Jésuites. L’Empereur de Chine, en 1710, répliqua en retirant au christianisme la protection qu’il lui avait accordée jusque-là. Une conciliation fut tentée en 1720, tentant d’accorder des « permissions » aux convertis chinois pour atténuer la rupture avec les pratiques confucéennes. Cela fut insuffisant : la chrétienté chinoise se divisa en deux groupes, un « permissif » et l’autre rigoriste. En 1742, le pape Benoît XIV, hostile aux jésuites, désavoua les « permissions ». Il réitéra sa position en 1744, mettant fin à la querelle[2]. Toutefois, ses conséquences se répercutèrent à nouveau en 1769, quand le roi Carlos III d’Espagne voulut bannir les jésuites de ses royaumes : les accusations forgées contre les jésuites pendant la querelle des rites, qu’ils toléraient l’idolâtrie et désobéissaient au pape, furent au cœur de la bataille.[3]

Tel est le récit des rebondissements les plus notables de la Querelle des rites. À le lire, il serait facile d’en faire une querelle de moine, épiphénomène de l’histoire des relations entre l’Occident et l’Asie. Pourtant, cette querelle de moines a fait couler beaucoup d’encre. En conclusion de son article de synthèse, Sierra Rodríguez allègue qu’elle est à la source des études sinologiques, qui n’ont jamais été poussées si loin[4]. C’est que l’enjeu était subtil et, par conséquent, difficile à trancher.

Gruzinski a formulé les enjeux de la querelle des rites ainsi :

Les effets de l’occidentalisation comme ses ratés soulèvent donc la question de l’étanchéité des cultures, de la mixité et des mélanges. Jusqu’à quel point et à quelles conditions l’Occident accepte-t-il de laisser subsister des cultures autochtones, quelles sont sa tolérance et sa perméabilité, mais également à quel moment se dénature-t-il, entraîné dans les syncrétismes et les réinterprétations? C’est le dilemme posé par la sinisation du christianisme qui alimenta l’interminable querelle des rites chinois. Comment enfin interpréter l’hybride qui jaillit du choc des résistances locales et de l’acculturation?[5]

L’enjeu de la Querelle des rites, pour le christianisme sinon pour l’Occident (une expression qui n’était pas encore passée dans les mentalités, du reste), est bien exprimé ici : à quel point le christianisme pouvait-il tolérer des adaptations à une autre culture sans cesser d’être « chrétien »? Qu’était-ce donc être « chrétien », finalement? Sous cette formule, l’enjeu est encore très philosophique. Mais les répercussions de la querelle dépassent les spéculations ontologiques. Outre la naissance des études chinoises, déjà mentionnées, il faudrait souligner que la querelle, et d’une manière générale tout le projet d’évangéliser le monde au-delà de l’aire culturelle de naissance du christianisme, a été le moment de la plus aiguë des prises de conscience des difficultés fondamentales de l’activité de traduction. Les missionnaires ont eu de nombreuses occasions de constater que, dans un environnement culturel éloigné, il était extrêmement difficile de transmettre le message évangélique. Comment, par exemple, traduire l’image du « bon berger » à des Inuits, qui n’avaient jamais vu de moutons et ne pratiquaient pas l’élevage?[6] La Querelle des rites peut être vue comme le sommet de la réflexion sur les difficultés de la traduction provoquées par les entreprises missionnaires. Il s’agissait non seulement de trouver le terme traduisant adéquatement un autre terme, mais de le traduire dans une structure sémantique complètement différente. Mais les deux enjeux, ontologique et sémantique, ouvrent à mon avis sur une dimension encore plus fondamentale de la Querelle des rites, qui affleure sans jamais être analysée dans les références que j’ai pu consulter jusqu’à maintenant sur cette question (je suis loin d’avoir lu la bibliographie intégrale!). Le débat sur la Querelle des rites a en effet accompagné les transformations qui avaient lieu en Europe même sur la portée de ce qu’était une religion, autrement dit sur la sécularisation du monde. À tel point que je suis tenté de formuler l’hypothèse que la Querelle a forcé ces transformations.

Delumeau a rappelé, dès 1975, le lien existant entre la Querelle des rites chinois et malabars et les missions intérieures, rurales, en Italie ou en France. L’enjeu était que, puisqu’on cherchait à expurger le christianisme des « superstitions » en Italie, il fallait bien faire la même chose en Chine. Ainsi, les élites chrétiennes découvraient donc que, en Europe même, à l’époque moderne, tous n’étaient pas chrétiens. C’est qu’entre le Moyen Âge et l’Époque moderne, une définition beaucoup plus stricte de ce qu’était « être chrétien » s’était imposée. Les malheurs des XIVe et XVe siècles — épidémies de peste, guerres de grande ampleur, schismes, chute de Constantinople — ont été interprétés comme des châtiments divins contre les chrétiens qui vivaient dans le péché. D’où le recentrement de la définition du christianisme sur le mode de vie de ceux qui l’incarnaient au plus haut point : les moines[7]. Dès lors, les paysans, artisans, bourgeois et même de nombreux nobles étaient renvoyés hors du christianisme — du moins, du « bon » christianisme, puisqu’ils étaient chrétiens par le baptême — et devaient être « réformés », « convertis », autrement dit amenés à changer de mode de vie. L’enjeu était criant : qui se comportait en chrétien? Qui ne l’était pas? La question se posait simultanément dans les missions lointaines et à la maison.

La question de savoir ce qui relevait de la religion ou non fut en effet la pierre de touche de la querelle entre jésuites et augustiniens. Si l’on suit l’interprétation de Marc Augé[8], l’un des arguments fondamentaux avancés par Matteo Ricci pour permettre aux Chinois de pratiquer les rites aux ancêtres (en les expurgeant d’éventuelles « superstitions ») était que le confucianisme n’était pas une religion. Par conséquent, n’étant pas placé sur le même pied que le christianisme, celui-ci pouvait cohabiter avec celui-là. C’était également, on s’en souvient, le sens de la déclaration que l’Empereur de Chine sur le confucianisme.

Delumeau a signalé que la querelle reposait en partie sur un malentendu :

Au vrai, les Jésuites et leurs adversaires ne se situaient pas au même niveau. Les premiers, surtout ceux de Pékin, vivaient au milieu de lettrés pour qui le Confucianisme n’était guère plus qu’une philosophie jointe à des cérémonies civiques et familiales. Les autres songeaient à la conversion de la masse chinoise. Or, pour « l’homme quelconque » du Céleste Empire, le Confucianisme était devenu une religion. Chacun avait donc raison, mais à son plan.[9]

Cela est sans doute vrai, mais on remarque que l’élément de désaccord demeure la question de savoir ce qui relève du religieux ou non. S’il y a un élément où l’analyse de Delumeau peut être prise en défaut, c’est sans doute de considérer que la ligne de partage de ce qui est religieux et ce qui est « civique et familial » va de soi. Mais est-ce bien le cas?

Derrière ces éléments se profile toute la question de savoir ce qu’est une religion et d’après quels critères on peut la reconnaître. D’où ma principale hypothèse de travail sur cette question : il me semble plausible que la Querelle des rites et d’autres polémiques semblables (l’occasion de futurs billets de blogue?) aient forcé une réflexion sur la définition de la religion, ouvrant ainsi la possibilité d’en restreindre le champ et de permettre à d’autres activités de s’en autonomiser. Ainsi, le domaine du politique et le domaine du culturel ont sans doute pu devenir visibles à l’occasion de ce type de polémiques, précisément parce qu’on s’efforçait d’identifier des comportements qui n’entraient pas dans le domaine du religieux.

Notes 

[1] Jean DELUMEAU et Monique COTTRET, Le Catholicisme entre Luther et Voltaire, PUF., Paris, 1996, p. 179.

[2] Ibid., p. 180‑182.

[3] David SIERRA RODRÍGUEZ, « La controversia de los ritos chinos y su dimensión, desarrollo y consecuencias ».

[4] Ibid., p. 19.

[5] Serge GRUZINSKI, « Christianisation ou occidentalisation? Les sources romaines d’une anthropologie historique », Mélanges de l’École française de Rome. Italie et Méditerranée, 1989, vol. 101, no 2, p. 750.

[6] Voir l’apparté d’Evans-Pritchard dans Edward E. EVANS-PRITCHARD, La religion des primitifs à travers les théories des anthropologues, Paris, Payot, 1965, p. 11.

[7] Jean DELUMEAU, « Déchristianisation ou nouveau modèle de christianisme? », Archives des sciences sociales des religions, 1975, no 40, p. 10‑14.

[8] Marc AUGÉ, Génie du paganisme, Paris, Gallimard, 2008, p. 43.

[9] Jean DELUMEAU et Monique COTTRET, Le Catholicisme entre Luther et Voltaire, op. cit., p. 180.

La référence que j’aurais dû lire pour ce billet, mais n’ai pas lue : 

Etiemble (présenté par), Les Jésuites en Chine : la querelle des rites, Paris, Julliard, 1966, 301 pages. Fiche worldcat.

 

Aux origines des revendications fiscales: Montréal

Le 12 février dernier, je suis allé voir une conférence organisée par le Groupe d’Histoire de Montréal dont le titre avait attiré mon attention : « « In Your Corporate Capacity »: Taxation and Poverty in Late Victorian Montreal », donnée par Elsbeth Heaman. Alors que nous vivons, au début XXIe siècle, une crise fiscale (selon l’expression de Brigitte Alepin), je me demandais ce qu’on apprendrait sur la fiscalité de la fin du XIXe siècle. Je dois dire avoir été impressionné par l’aisance de la conférencière. Si j’ai l’occasion de retourner la voir, j’en profiterai certainement.

Le compte-rendu qui suit, écrit un mois plus tard sur la foi de deux petites pages de notes (prises davantage pour maintenir l’attention pendant la conférence que pour faire un compte-rendu) ne peut rendre compte de l’intégralité du contenu. J’espère seulement qu’il ne contient pas trop d’erreurs, d’autant que je ne suis ni historien du Canada ni contemporéaniste.

La conférence reflète le contenu d’un chapitre du livre en préparation de Mme Heaman portant sur les politiques fiscales et les luttes sociales au Canada. La chercheuse s’intéresse à la figure de John A. Macdonald dont la domination sur la politique canadienne jusqu’en 1891 demande à être éclaircie. Or, le premier ministre aurait transformé le Canada de cette époque en véritable « empire fiscal » au service de la classe d’affaires. On se souvient que c’est aussi vers la fin du XIXe siècle qu’Alain Deneault a localisé les premiers signes de construction de paradis fiscaux dans les Caraïbes depuis le Canada. Le système fiscal canadien de la fin du XIXe siècle avait une dimension authentiquement prédatrice, ayant pour objet non seulement de financer l’État, mais aussi de maintenir les pauvres dans un état d’impuissance politique. À la fin du XIXe siècle, cette taxation prédatrice fut l’objet d’une vive contestation à travers le Canada. La première contestation vint de Montréal (sur laquelle portait la conférence), qui servit d’inspiration par la suite ailleurs au Canada. Deux exemples de taxes régressives illustrent l’objet des luttes montréalaises.

Un premier exemple vient de la corvée, une taxe établie à l’origine pour la construction du réseau routier. Sur papier, elle pouvait être acquittée en argent (destiné à acheter les matériaux, outils ou à payer des employés) ou en travail. Mais à la fin du XIXe siècle, le réseau était complété et il n’y avait plus de travail. La taxe, maintenue malgré la disparition de son objet, ne pouvait donc plus être acquittée qu’en argent, ce que les pauvres ne pouvaient se permettre. Or, celui qui ne payait pas ses taxes se voyait privé de son droit de vote.

La constitutionnalité d’une taxe aussi régressive était contestée. Elle s’ancrait toutefois également fortement dans les idéologies des élites. On était encore dans une mentalité de suffrage censitaire où on estimait que seul celui qui contribuait à l’État par ses taxes et avait des biens à défendre pouvait légitimement se prononcer sur l’élection des dirigeants. Le demos (le peuple) de démocratie, c’était le peuple des possédants. Un avocat questionné sur la constitutionnalité de la corvée aurait ainsi reconnu qu’elle n’était sans doute pas valide, mais pour ajouter aussitôt qu’une démocratie avait besoin d’une poor tax, une taxe aux pauvres, destinés à les écarter du suffrage. Clairement régressive, la corvée fut cependant abolie à cette époque (je n’ai pas noté la date).

Autre taxe controversée, la taxe sur l’eau. Elle avait été établie avec deux objectifs. Le premier avait trait à la construction des infrastructures afin de rendre l’eau accessible à tous. Le second était pédagogique. Il s’agissait en effet de former un bon sujet libéral, sensible à valeur de la propriété, dotée d’une bonne discipline de contribuable. Les pauvres, cibles de cet objectif « pédagogique », devaient ainsi être amenés à intérioriser les valeurs de l’État libéral. Entre ces deux objectifs, il y avait contradiction, car imposer la taxe aux pauvres pour les transformer en bons sujets libéraux allait à l’encontre de l’objectif d’accès universel à l’eau que devait remplir la mise sur pied du réseau de distribution. Or, c’est le second objectif qui fut privilégié. Entre cet objectif et la médiocrité du réseau de distribution, la taxe fut extrêmement difficile à collecter et, en outre, ouvertement contestée. La ville la défendit vivement — un graphique distribué pendant la conférence illustre que la taxe sur l’eau représentait la deuxième source de revenus de la ville (environ 30 % du budget), loin derrière les taxes foncières, mais loin devant les taxes sur les affaires — en s’efforçant d’argumenter que la taxe était progressive.

Cette question (progressivité/régressivité de la taxe sur l’eau) était difficile à trancher avec l’outillage de l’époque. Répondre à la question (difficilement concevable aujourd’hui) « l’État doit-il continuer à prendre l’argent aux pauvres pour le transmettre aux riches? » (les riches étant présumés savoir mieux quoi en faire) ne pouvait être résolue sans une définition de la pauvreté, qui n’existait pas à cette époque. L’une des thèses décisives proposées par Heaman est que les luttes de contestation de la taxe sur l’eau, qui culminent en 1891, ont ainsi débouché sur une « découverte de la pauvreté », c’est-à-dire sur l’élaboration de nouveaux savoirs sociaux permettant la recherche des mécanismes de production et de reproduction de la pauvreté. C’est grâce à ces savoirs sociaux qu’on a pu enfin politiser le problème de la pauvreté. Même sans remporter de victoire immédiate, il s’agirait donc d’un moment-clé dans l’histoire de la lutte contre la pauvreté.

Je terminerai ce billet sur deux réflexions personnelles. En premier lieu, si j’ai attendu plus d’un mois avant de me décider à écrire un billet sur cette conférence, c’est qu’il ne me semblait pas que mes maigres notes me permettaient d’y rendre justice et que le risque de transmettre une erreur me faisait hésiter. Si cependant j’ai décidé d’écrire ce billet et de le publier, c’est que cette conférence m’a fasciné. L’aridité apparente du thème cache en effet une histoire très vivante, passionnante tant comme histoire des misères quotidiennes que comme sociohistoire du pouvoir. Or, cet épisode de notre passé a été pratiquement supprimé de notre mémoire collective. Pas un mot dans mes cours de secondaires, pas un mot dans mes cours d’histoire du Canada contemporain à l’université (pourtant donnés par un spécialiste des luttes ouvrières). De même, pas un film, pas une série télévisée ou un documentaire grand public qui en rendent compte. Pourquoi? L’hypothèse qui me vient à l’esprit est que la mémoire québécoise est structurée par deux matrices qui excluent les luttes sociales du XIXe siècle. La première est la matrice nationale (d’où l’importance de la Conquête, des Rébellions patriotes, de la crise de la conscription et des référendums sur l’indépendance). La seconde est la Révolution tranquille, vue comme le point d’origine de toutes les luttes sociales (excluant par conséquent qu’il ait pu y en avoir avant cela).

En second lieu, une question me trotte dans l’esprit. 1891, ce n’est pas si loin. C’est une époque connue par mes arrières-grands-parents. Ce pourrait-il que la proximité de cette taxation prédatrice à l’encontre des pauvres, même disparue de notre mémoire collective, ait laissé des traces? Se pourrait-il que le rejet viscéral de la taxation manifesté par certains de nos contemporains leur ait été transmis par des gens qui ont connu cette époque? L’histoire récente a démontré que la fiscalité peut être mise au service du peuple, mais il se pourrait bien que cette réalité n’ait pas été entièrement intériorisée. Quand, par ailleurs, l’évasion fiscale et la tarification rendent possible la réémergence d’une taxation prédatrice, il y a matière à s’inquiéter.

Une réflexion post-scriptum me semble de mise. Il me faut en effet signaler que les deux réflexions personnelles émises dans ce billet relèvent d’une logique différente de celle de la conférence de Mme Heaman. En effet, il s’agissait pour elle de communiquer des résultats de recherche, cela relève donc d’une logique d’histoire scientifique. Mais la fascination que j’ai signalée comme un motif pour écrire ce billet est un critère affectif, il relève donc d’une logique d’histoire mémorielle. La seconde réflexion est moins définie, puisqu’il s’agit au fond d’une question. Elle naît d’une préoccupation politique, mais est susceptible d’être traduite en d’autres recherches scientifiques ou en un argumentaire militant, selon la logique avec laquelle chacun voudra y répondre.

Un carnet de notes cliosophiques

Qui suis-je?

Ce premier billet, je l’écris à l’heure d’un post-partum : c’est le terme en usage, autour de moi, pour désigner la période qui suit une soutenance de thèse. L’accouchement, c’était le 18 décembre dernier. Pas trop douloureux, il m’a valu de belles félicitations pour le bébé et un titre de docteur en Histoire (décerné par l’Université de Montréal) et en Études romanes (spécialité études hispaniques et latino-américaines, décerné par l’Université Paul-Valéry-Montpellier III). Me voici donc porteur de ces titres ronflants dans des disciplines dont on entend régulièrement dire qu’elles ne servent à rien, un défi face auquel les praticiens de ces disciplines hésitent encore entre deux réponses: revendiquer leur « droit à l’inutilité »[1] ou tenter de démontrer leur utilité profonde, souterraine, donc invisible, mais bien réelle. Voilà bien un problème auquel il me faudra réfléchir.

Ma thèse porte sur les méthodes d’évangélisation des morisques dans l’Espagne du XVIe siècle. Autrement dit, sur les relations entre les chrétiens et les musulmans dans un passé commun au monde occidental et au monde musulman. Même si je continue à me faire dire que mes travaux ne servent à rien, j’ai quand même cette chance inouïe : ils suscitent la curiosité, une chance que n’ont pas tous mes collègues. Mais mes intérêts dépassent largement le thème de la thèse que j’ai soutenue. Je crois fermement, du reste, que la recherche spécialisée n’est rien si elle ne se nourrit pas de recherche générale. Les connaissances générales ne suffisent d’ailleurs pas en elles-mêmes si aucune d’entre elles n’est approfondie. Les choses deviennent intéressantes lorsque plusieurs thèmes, n’ayant a priori aucun lien entre eux, sont approfondis. Les liens se révèlent alors tranquillement et permettent d’atteindre l’universel à travers le particulier et vice-versa. Cette formulation est abstraite, mais c’est en partie pour préciser et illustrer la conviction qui la sous-tend que j’ouvre ce blogue.

Une bibliothèque à (re)conquérir

Tous mes amis ayant un profil d’intellectuel connaissent ce phénomène : on achète souvent les livres plus vite qu’on ne les lit. On a forgé un mot japonais pour désigner pour désigner ce phénomène : tsundoku, acheter des livres et ne pas les lire en raison de leur trop grand nombre, laisser les piles s’accumuler sur les étagères et un peu partout dans la maison. Je ne vois pas la chose comme un gaspillage : les livres achetés ne le sont pas par hasard. Les livres rangés sur mes étagères sont là pour me rappeler l’évolution de mes intérêts, les projets à réaliser. Tout l’art consiste à ne pas laisser le Minotaure échapper à tout contrôle. Au cœur du labyrinthe, il faut un fil d’Ariane. La bibliothèque ainsi formée est un espace à conquérir, un programme de lecture qui possède sa propre écologie.

Mais même les livres entièrement lus sont toujours à relire. C’est que la mémoire fuit et que les préoccupations changent. Les connaissances évoluent, également, et relire donne à faire de nouveaux liens. Par exemple, j’ai lu La Peur en Occident, de Jean Delumeau, en 2007. J’y suis revenu de temps en temps pour le feuilleter et y piger quelques informations, au gré de mes besoins, mais je ne l’ai plus relu dans son entièreté. Or, je m’en souviens suffisamment pour avoir la certitude que je le relirais d’une manière entièrement différente aujourd’hui. C’est bien sûr parce que j’ai lu beaucoup d’autres choses depuis et que ma pensée a beaucoup évolué. D’où ce sentiment, qui me saisit parfois que, à chaque titre qui s’ajoute à ma bibliothèque, c’est l’entièreté de celle-ci qui est à relire. C’est une exagération, certes, mais le sentiment est bien là. Par ailleurs, les livres sont toujours plus vastes que ce qu’on en perçoit en les lisant. Chaque fois que j’ai une nouvelle question, sur un thème qui ne m’avait jamais intéressé auparavant, j’ai la surprise de découvrir que ma bibliothèque contient déjà une quantité d’informations appréciables sur le sujet.

Mais quand je parle de « bibliothèque », je devrais peut-être préciser que je ne parle pas que de livres. J’ai plusieurs caisses remplies d’articles imprimés ou photocopiés, classés par thèmes. Sur mon ordinateur, j’utilise OneNote pour archiver tous les articles scientifiques qui me paraissent intéressants : de cette manière, je peux faire des recherches par mots-clés à l’intérieur et rajouter des hyperliens entre différents éléments des articles. De même, sur internet, j’utilise l’outil Diigolet pour archiver tous les articles intéressants et les regrouper par tags (je n’ai pas encore utilisé l’outil d’organisation des articles). Écrire des articles de blogues sur ces articles archivés sur OneNote ou Diigolet est un moyen de reconquérir cette bibliothèque qui me fuit sans cesse.

Un carnet de notes en ligne

L’objectif de ce blogue est donc avant tout d’être un « carnet de notes » suivant le rythme de mes lectures. J’y ferai par conséquent des résumés de livres, de chapitres ou d’articles. J’y aborderai aussi des thèmes liant différentes lectures entre elles. Je prendrai également des notes sur l’évolution de mes pensées sur différentes questions.

Un carnet de notes en ligne, ce n’est pas un carnet de notes tout court. Puisque cela implique que j’ai des lecteurs, les notes seront mises en forme pour être accessibles à ces derniers. Mais cela implique aussi que certaines notes ne puissent pas être rendues publiques. En réfléchissant au rôle que devait jouer un journal de recherche dans le travail d’un historien, Gérard Noiriel note que :

L’obstacle majeur, pour les sciences sociales en tout cas, auquel se heurte la tenue d’un journal de ce type, tient au fait qu’il faut alors « se regarder chercher ». Dans la perspective d’une publication, on intériorise par définition le regard du public. Le journal devient alors une « mise en scène » à usage externe, où l’on gomme les banalités, les naïvetés, les remarques critiques sur les travaux des collègues et néanmoins amis… Le journal de recherche ne peut donc avoir d’utilité que s’il constitue un instrument personnel pour l’historien, qui peut l’aider au fur et à mesure de ses investigations, et au moment de la rédaction finale, à conserver la trace de toutes les pistes, les questions et les hypothèses qui, même si elles ont été abandonnées, pourront à terme se révéler fécondes.[2]

Un journal de recherche complet implique donc de consigner un certain nombre de notes qui perdent leur véritable sens dès lors qu’elles sont lues par quiconque n’est pas le chercheur lui-même. C’est un texte que l’auteur s’écrit à lui-même et à personne d’autre. Dans ces conditions, l’idée d’un journal de recherche en ligne paraît absurde. L’intérêt du blogue recoupe en partie celui d’un journal de recherche, mais pas entièrement. Par conséquent, il ne peut s’y substituer et mérite essentiellement d’exister par ce qui fait sa spécificité. Cette dernière réside exactement dans ce qui l’empêche de se substituer au journal de recherche personnel : la présence d’un lecteur externe. Ce lecteur se manifeste à l’occasion par les commentaires, qui permettent d’échanger sur un work in progress. Mais si les commentaires sont intéressants, ils ne font pas le blogue : même lorsqu’on ferme ceux-ci, il demeure blogue. C’est simplement de savoir que quelqu’un d’autre peut lire le contenu du blogue qui oriente la manière dont l’auteur écrit. Voilà, avant tout, ce qu’il faut mettre à profit.

D’autres avantages complètent celui-ci, liés aux attentes face à un blogue et à la forme permise par internet. Le blogue comporte un volet de navigation et des hyperliens, contrairement au journal de recherche écrit à la main. Il peut ainsi acquérir, au fil du temps, une écologie intéressante que ne révèle pas le journal de recherche personnel. D’autre part, la forme du blogue — au contraire de celle de l’article scientifique, par exemple — permet les réflexions suspendues, les ballons d’essai, les simples questions, les liens entre vie personnelle et réflexion. Ainsi, sa dimension plus ou moins informelle fait partie de son intérêt.

Le principe de la « traduction » selon Noiriel

Mes travaux sont ceux d’un historien. Mais à l’heure des lectures, les limites disciplinaires doivent être franchies, c’est d’une nécessité vitale. Pas forcément abolies, en revanche : les textes étant écrits en fonction de préoccupations en partie déterminées précisément par ces limites disciplinaires, ce serait se condamner à ne rien en comprendre que de ne pas tenir compte des contraintes qu’elles imposent. Gérard Noiriel a souvent indiqué, dans ses travaux, l’importance de procéder, entre les disciplines, à des opérations de « traduction ». La récupération d’un concept en usage dans une discipline par un spécialiste d’une autre discipline est tout à fait acceptable, mais doit se faire à certaines conditions pour être efficace : expliquer le sens, expliciter la transposition d’un objectif à un autre, parfois « désosser » une lecture (récupérer une traduction, par exemple, ne signifie pas récupérer l’objectif de l’ouvrage pour lequel on l’a créée) . (1)

Mais la traduction ne s’opère pas seulement entre des disciplines, elle s’opère également entre des logiques. La logique de l’expertise n’est pas la logique de la critique : l’une et l’autre ont des objectifs différents et doivent donc procéder différemment. De même, la logique de la science n’a rien à voir avec la logique militante. Or, si une même personne n’a pas à choisir d’occuper toujours le même rôle, elle se doit cependant d’apprendre à identifier et expliciter le rôle qu’elle occupe à un moment donné.

Les carnets de notes sont parfaits pour ce type de réflexion sur les limites. Ils permettent d’esquisser nos préoccupations citoyennes ou personnelles et de nous demander ensuite : comment cela se traduirait-il en recherche? Ou, à l’inverse, de s’interroger sur nos connaissances théoriques et de se demander : qu’est-ce que cela signifie pour le monde où nous vivons?

C’est pourquoi un carnet de notes orienté vers les recherches ne se limite pas seulement à celles-ci : il s’agit aussi de tenir un journal de mes préoccupations et une réflexion de ce qui les lie aux recherches. Oserai-je dire que c’est parfait pour un blogue? Ça me permet de parler de tout et de rien tout en ayant un thème directeur qui me sert de branding!

Pourquoi « Cliosophie »?

Le terme est un amalgame de « Clio », la Muse de l’Histoire, et du « sophie » de « philosophie ». Littéralement, cela signifierait donc « sagesse de l’histoire », ce qui est, je le reconnais, un peu pompeux. Je n’ai nulle prétention d’être un philosophe, bien que j’aime fréquenter cette discipline en dilettante. Je suppose que c’est cette affection qui m’a inspirée ce néologisme. Cela se réalise concrètement par le fait que mes relations sociales comportent presque autant de philosophes que d’historiens. La question de savoir quels liens entretiennent les deux disciplines m’occupe donc fréquemment l’esprit. C’est d’autant plus vrai que la philosophie politique recoure souvent à une perspective historique pour alimenter la réflexion sur les sociétés actuelles, tandis que les historiens, pour leur part, se font souvent apostropher sur l’utilité de leur discipline. Autant dire que cette réflexion sur la traduction de l’histoire en philosophie ou, à l’inverse, de la philosophie en histoire, est un chantier qui me préoccupe. Pourquoi donc ne pas « cliosopher » un peu ici même?

Notes

(1) Le terme « désosser » vient de Noiriel lui-même, dans une entrevue à la revue Trace : « Je dis toujours à mes étudiants : quand on fait de la recherche, on va puiser des outils dans le travail des autres de façon sauvage, en les désossant. »[3]

Notes

[1] Jean-Philippe WARREN, « Liberté, gratuité, révolution. Les facteurs scolaires de la révolte étudiante », Argument. Politique, société, histoire, 2013, vol. 15, no 2, p. 34.

[2] Gérard NOIRIEL, « Éloge de la traduction », in Réfugiés et sans-papiers. La République face au droit d’asile XIXe-XXe siècle, Paris, Calmann-Lévy, 1991, p. 16‑17.

[3] Gérard NOIRIEL, Arnaud FOSSIER et Édouard GARDELLA, « Quel pragmatisme en histoire ? Entretien avec Gérard Noiriel », Tracés. Revue de Sciences humaines, 2008, no 15, pp. 243‑254.